Botanique
La botanique, science du végétal, est une science très ancienne. Elément de base des civilisations, la plante est utilisée par l’Homme pour se nourrir, se soigner mais aussi se vêtir et peut être déjà se parfumer et se parer. Ce savoir ancestral a été véhiculé oralement, désignant les plantes selon leur nom vernaculaire, sans classification particulière mais en relation avec leur utilisation.
Les premières représentations de plantes datent de la très haute Antiquité. La botanique est un art horticole et ornemental dans
l’Egypte ancienne et les fresques de cette époque
représentent aussi
bien des moissonneurs au travail que des compositions florales. Les palmiers-dattiers, Phoenix dactylifera (Arecaceae), sont omniprésents sur ces gravures. C’est
une des plantes alimentaires, avec le figuier et l’olivier, qui a la plus
grande histoire commune avec les populations humaines de Méditerranée.
Il faut toutefois attendre l’avènement de la Grèce
Antique et les travaux d’Aristote (350
ans av. J.C.) pour que la science des plantes prenne toute son amplitude
scientifique. Son Liber de plantis discute de la
place des plantes dans l’ensemble des choses.
Disciple d’Aristote, Théophraste (vers 372-287 av. J.C.) , père de la botanique, étudie la nature et observe les différences morphologiques et les caractères distinctifs entre les êtres vivants. Vers 320 av. J.C., il compile ses observations et expérimentations dans ses Historia plantarum. La version conservée à la Bibliothèque de Bastia date de 1644.
La plupart des ouvrages manuscrits de l’Antiquité ont diffusés dans toute la Méditerranée et ont été recopiés (et
modifiés !) pendant le Moyen-Age (grec, latin, perse arabe), puis commentés et interprétés à la Renaissance. Si Théophraste a été complètement
oublié jusqu’à sa traduction en latin en 1483, ses premières traductions ont été réalisées en arabes, vers 850. La première impression du texte grec de
l’Histoire des Plantes parait en 1487. De sorte que les Bibliothèques insulaires possèdent aujourd’hui parmi les plus anciennes éditions des
traductions de ces savants antiques.
Théophraste élargit les connaissances botaniques de l’époque, qu’il compile dans neuf volumes d’un immense travail, traitant de plantes lointaines et pas uniquement utilitaires, révélées notamment par les expéditions de son ami Alexandre le Grand. Ces guerres nécessitant la construction de navires, la production de bois devient un sujet de première préoccupation. Il faut ainsi étudier les ressources offertes par les plantes locales mais aussi exotiques. La botanique occupe donc un rôle économique important et Théophraste s’intéresse à la foresterie.
« bien que les bois du Latium soient extrêmement beaux, ce n’est rien à côté de ceux de Corse. [...] Ainsi donc, soit parce qu’elle est laissée à l’état de nature, soit à cause de son sol et de son climat, la Corse l’emporte de loin sur les autres régions. » et en relatant une tentative romaine pour établir un chantier naval en Corse : « Un jour, dit-on, les Romains, voulant se donner une flotte qu'ils construiraient dans l'île, s'y transportèrent avec vingt-cinq bateaux ; la taille des arbres y était telle que pendant leur reconnaissance de golfes et de rades, la rupture de leurs mâts les fit aborder dans une épaisse futaie. Du reste, l'île tout entière était boisée et comme assauvagie par la forêt ; aussi renoncèrent-ils à fonder leur ville. Quelques-uns cependant se frayèrent un passage et abattirent sur un espace restreint une énorme quantité de bois qui leur permit de former un radeau de telles dimensions qu'ils l'équipèrent de cinquante voiles ; celui-ci néanmoins se disloqua en haute mer »
L’œuvre de Théophraste est considérée comme une telle panacée que la botanique théorique disparait en Occident pendant près de … dix-huit siècles ! Les observations botaniques de Théophraste sont reprises par Dioscoride (1er siècle après J.-C.) puis par Pline l’Ancien (23-79 après J.-C.), mais dans le seul domaine pharmacologique et non plus théorique. Durant cette période, ceux qui avaient pour profession de guérir les blessures avec des plantes, ceux donc qui herborisaient pour rechercher ces plantes, sont d’ailleurs qualifiés de Rhizotomos, rhizothomes ou « coupeurs de racines » (terme repris par Rabelais, dans le chapitre XXIII de Gargantua, traitant de son éducation et où il est question de plantes) et Pharmakopolès « vendeurs de remèdes » ceux qui en commerçaient dans des Apothécai, terme qui a dérivé en Apothicaire mais aussi botega en italien et boutique en français.
Même si certains rhizotomes s’adonnaient encore à certaines pratiques rituelles, notamment pour les conditions de cueillette, beaucoup ont participé à la reconnaissance et à la publication d’observations végétales pertinentes. A une époque où méthode et classification étaient inconnues, ils ont ainsi contribué à la transmission du savoir botanique à travers le temps. Les noms des plantes restent en effet quasiment ceux donnés par ces « coupeurs de racines » pendant plusieurs siècles, jusqu’à l’avènement de la classification binominale de Linné, dans la première moitié du XVIIIe siècle, qui conserve d’ailleurs, et aujourd’hui encore, les noms donnés par les savants antiques, tels que Anchusa, Anemone, Anthemis, Aristolochia, Iris, ou encore Helleborus, Hyoscyamus, Oenanthe, Narcissus, Scilla et beaucoup d’autres…
Plus tard, Apuleus Barbarus, ou encore Pseudo-Apulée, rédige l'Herbarius, un livre de botanique comportant l’analyse de 132 plantes différentes, au VIe ou Ve siècle après JC, dont le plus ancien manuscrit conservé date du VIe siècle. La première édition imprimée de l’Herbarius date de 1481.
L’exemplaire
conservé à la Bibliothèque d’Ajaccio, imprimé en 1537, est donc l’une de plus ancienne
réédition. L’ouvrage
de Gabriel Humelberg (25 XXIX 8), médecin humaniste et botaniste allemand de
Ravensburg ( ? – 1544), est un recueil de recettes médicinales associées à
des plantes, avec 75 peintures de plantes et quelques-unes d'animaux (scorpion,
serpents, aigle...), suivis des commentaires du médecin, citant Hippocrate,
Dioscoride, Columelle, Pline ou Palladius. Tenant
lieu de chapitre 1er, l’ouvrage reprend l’Herbarius d’Apuleius Barbarus mais aussi le traité
antique d'Antonius Musa,médecin
d’Auguste (63 av. JC – 14 av. JC).
Son
ouvrage médicinal et botanique, initulé De
herba vetonica, apparait dans le Codex
Vindebonensis 93, datant de la fin de l’Antiquité. Le naturaliste Carl Von
Linné, fondateur de la nomenclature du vivant, donna en son honneur le nom de Musa au genre regroupant notamment les
bananiers.
Ainsi, dès
les premières années de notre ère, les travaux et concepts de Théophraste sont
oubliés, la botanique est réduite à une liste de drogues à base végétale et ne
restera qu’un ajout à la médecine…
Descriptions de cette exposition virtuelle
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