Louis Campi a légué un certain nombre de manuscrits consacrés exclusivement à la Corse. Il offre deux types de manuscrits, certains d’époque (dûment achetés dans les salles de ventes) et d’autres religieusement recopiés par Louis Campi lui-même ! Le plus ancien manuscrit de ce don est « La Colonna sagra », datant de 1686, rédigé par D. Angelo Francesco Colonna docteur en droit et archidiacre de la ville d’Ajaccio. Ce manuscrit évoque la vie d’Ugo Colonna : « Ugo Colonna aurait dirigé la reconquête de l’île sur les sarrasins au IXe siècle et serait devenu ainsi l’ascendant avec ses compagnons de familles romaines Savelli et Nasica, de toute la noblesse insulaire ».

Louis Campi et les manuscrits

Cette curiosité envers l’histoire de la famille Colonna transparait dans ses achats de livres. Ainsi nous possédons dans nos collections une belle édition vénitienne de 1658 de l’ « Historia della augustissima famiglia Colonna » par Don Filadelfo Mugnos. On peut donc lire à la page 103 une biographie d’Ugo Colonna chiamato il magno prencipe di Corsica. Figure historico-légendaire dont on trouve la trace dans les chroniques de Giovanni Della Grossa au 15es. Légendaire ou réel, on sent qu’à travers ses acquisitions, Louis Campi cherchait à dénouer ce mystère ! Il a complété ses recherches par des ouvrages sur les branches supposées de cette grande famille telle que les Colonna d’Istria avec l’Origine e discendenza della Famiglia Colonna d’Istria, une édition parisienne de 1777.

L’histoire des Colonna… un intérêt attesté de Louis Campi

Ces quatre manuscrits relatent la vie de trois générations de corses illustres d'une même famille. Le premier raconte l’histoire de Sampiero Corso (1498-1567), mercenaire européen du 16e siècle principalement au service de la France et personnage illustre de l'Histoire Corse (dans sa lutte pour soustraire la Corse à la domination génoise). Ce manuscrit fut rédigé par Jean Canault, secrétaire d'Alphonse d'Ornano maréchal de France et fils de Sampiero Corso et de Vannina d'Ornano. Ce manuscrit inédit du fonds corse de la bibliothèque Fesch a été recopié soigneusement sur celui de la Bibliothèque d'Aix en Provence en date de 1871 par Louis Campi lui-même.

MANUSCRIT l’abrégé de San Petre de CANAULT

Les deux autres manuscrits ont également été recopiés par Louis Campi à la Bibliothèque d’Aix en Provence en 1871. Ils illustrent les mémoires d'Alphonse d'Ornano maréchal de France et lieutenant général pour le Roy de Guyenne écrite donc par Jean Canault son secrétaire, qui a aussi rédigé les mémoires de son fils Jean-Baptiste d'Ornano.

MANUSCRIT La vie d'Alphonse d'Ornano, Maréchal de France et Lieutenant Général du roi de Guyenne, de CANAULT ; 2 volumes

Le dernier manuscrit n'a pas été recopié par Louis Campi. Il en a fait l'acquisition en juin 1895. Il s'agit d'un manuscrit du 18e portant l'ex libris D.D. L.L de Nicolay.
Il est important de noter que Louis Campi n'a pas travaillé sur les manuscrits originaux mais très certainement sur des copies du 18e réalisées par Jean Bouhier de Savigny historien, traducteur et bibliophile.

MANUSCRIT La vie de Jean-Baptiste d'Ornano fils, maréchal de France, colonel des Bandes corses, lieutenant général pour le Roy en Normandie, de CANAULT

Ces deux ouvrages sont un bel exemple des achats éclairés de Louis Campi. Son auteur Bellin Jacques-Nicolas (1703-1772) était cartographe au dépôt des Cartes et Plans de la Marine (en 1721), ingénieur hydrographe de la Marine (en 1741), et rédacteur des observations critiques pour la 2e éd. du Neptune françois de 1753.

BELLIN

Altas de l’Isle de Corse, par le sieur Bellin, ingénieur de la marine 1769, 32 cartes pliées montées sur onglets en un vol. in-4, v.marbr, fil. Exemplaire aux armes de Louis XV acheté sur catalogue de la librairie de Claudin, Paris en 1882. Lot n°176

Le premier exemplaire et le plus remarquable

Description géographique et historique de l’Isle de Corse, pour joindre aux cartes et plans de cette Isle accompagnée de 38 cartes. P., Didot, 1769, in-4, pl.veau. Exemplaire acheté sur le catalogue de la librairie Marcel Poyer.

Le second et complémentaire

Gaston Charles Vuillier (1845-1915) est un dessinateur, un voyageur et un ethnographe. Il est né en 1845 à Perpignan et mort en 1915 à Gimel (Corrèze). Il a travaillé pour les grandes revues illustrées du XIXe siècle tel que le Magasin pittoresque, et surtout pour Le Tour du Monde. « Au tout début des années 1890, Vuillier embarque pour la Corse.

Gaston Vuillier, La Corse, Hachette Paris, 1891

C’est après l’Andorre, son second reportage pour la revue de voyages Le Tour du Monde. Il part, la tête emplie d’images de vendetta et de bandits, dont il va peu à peu se déprendre pour tenter de se rapprocher des êtres et des choses croisés en chemin. Il assiste ainsi au rituel de funérailles d’une femme morte de consomption et s’intéresse tout particulièrement au rôle des vocératrices qu’il décrit longuement dans la seconde livraison avant de s’attarder sur l’ensemble des rituels funéraires et des rapports à la mort.

Si son récit est parfois d’une étonnante qualité ethnographique, il reste aussi teinté d’une atmosphère tragique, de violence et de mort, nourrie de multiples anecdotes. »

LLucie Desideri

Au détour d’un article du Petit Bastiais, on peut y lire le récit du don de Louis Campi à la Ville d’Ajaccio. On apprend que peu de temps après son décès, le 10 mai 1905, la Ville d’Ajaccio accepte ce don. Son épouse et son gendre le député Gabrielli en sont les dépositaires : « Sur une lettre du 26 avril écoulé M le député Gabrielli a informé M. le Maire que son regretté beau-père M. Louis Campi, avait de son vivant, laissé deviner l’intention de léguer à sa ville sa très intéressante bibliothèque sur la Corse ainsi qu’un sarcophage antique… ».

Ex-Libris

Voici pour l’essentiel et pour l’ex libris ? La famille impose ses conditions à ce don : « dans l’intérêt de la collection en question, chaque volume soit revêtu du cachet de son beau-père et ne puissent être consulté sur place ».

Cette mission en plus de celle d’établir un inventaire des collections reviendra à Jean-Baptiste Marcaggi, bibliothécaire et écrivain. Aujourd’hui encore on peut distinguer sur la première page des ouvrages un cachet en encre bleue indiquant « ex libris ludovici Campi adjacensis » !